Il y a quelques semaines, je discutais avec ma mère au téléphone. C'était une conversation tout à fait banale, pour prendre des nouvelles l'une de l'autre, ainsi que d'autres membres de notre famille. Mais lorsque le thème de Noël est apparu, j'ai immédiatement ressenti un changement. Ma mère est devenue un peu plus réservée. "Comment te sentirais-tu si on n'échangeait pas de cadeaux cette année ?" m'a-t-elle demandé. J'ai poussé un énorme soupir de soulagement.
Il s'est avéré que ma mère avait été désignée par les autres membres de notre famille pour aborder avec moi ce sujet potentiellement sensible. En tant que petite dernière, j'ai toujours été celle qui tenait le plus à nos différentes traditions familiales, même lorsque mon frère et ma sœur aînés ont cessé de s'y intéresser. J'étais si catégorique sur le fait de ne pas renoncer au fait que le Père Noël existe, de peur que cela ne gâche les fêtes, que le reste de ma famille a été obligé de jouer le jeu jusqu'à mes 15 ans. Il n'est donc pas surprenant qu'ils aient été inquiets à l'idée de supprimer complètement les cadeaux. Mais, en 2020, je suis plus que prête à renoncer à toute coutume un tant soit peu stressante - aussi précieuse soit-elle - au nom de la simplicité.
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Je ne suis pas seule dans ce cas, et ma famille n'est pas la seule non plus à considérer le fait de faire des cadeaux comme une activité éprouvante pour les nerfs en cette période de fêtes. Selon un sondage réalisé par OpinionWay pour Proximis, plus d'un Français sur deux ne fêtera pas Noël en famille dû au Covid-19 et 53 % des personnes interrogées déclarent qu’elles achèteront moins de cadeaux que les années précédentes. Le budget Noël est aussi à la baisse : les Français envisagent de dépenser 30 % de moins par rapport à 2018. Mais la France est loin d'être le seul pays touché. L'enquête de WalletHub sur le coronavirus et les achats de Noël aux États-Unis, menée auprès de 1 500 personnes, a également montré que près d'une personne sur trois se passe de tout échange de cadeaux de Noël cette année en raison de la COVID-19.
Pour beaucoup, cette décision de ne pas échanger de cadeaux a été influencée par des préoccupations financières. L'enquête OpinionWay a démontré qu'avec la crise, trois Français sur quatre se disent stressés à l'idée de faire leurs achats de Noël. Alors que, cinquante-quatre pour-cent des Américains interrogés par Credit Karma ont déclaré qu'ils se sentaient plus stressés financièrement à propos des fêtes que l'année dernière ; et 34 % ont déclaré qu'ils avaient l'impression de ne pas être préparés financièrement pour les fêtes, 50 % d'entre eux précisant qu'ils s'inquiétaient de pouvoir offrir des cadeaux. Cela est bien sûr logique, étant donné que la pandémie de coronavirus a entraîné une montée en flèche des taux de chômage, une insécurité financière généralisée et un effondrement de l'économie. Au cours des huit derniers mois, beaucoup ont eu du mal à couvrir leurs frais de subsistance de base, comme le loyer, si bien que participer aux échanges de cadeaux Secret Santa n'est non seulement pas une priorité, mais n'est même pas vraiment possible.
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Même si vous avez la chance d'avoir conservé votre emploi tout au long de l'année 2020, il existe peut-être d'autres raisons pour lesquelles vous ne souhaitez pas participer aux échanges de cadeaux cette année. Pour certains, la pression de choisir les cadeaux parfaits pour tous leurs proches est un fardeau énorme tous les ans, mais elle n'a fait qu'augmenter cette année. Dr Shawn M. Burn, professeure de psychologie à l'Université polytechnique de Californie et auteure de Unhealthy Helping : A Psychological Guide to Overcoming Codependence, Enabling, and Other Dysfunctional Giving, écrit dans Psychology Today : "Pour les personnes empathiques, le fait de faire des cadeaux peut engendrer toutes sortes de pensées et d'efforts qui prennent du temps, car elles anticipent ce que leurs cadeaux peuvent signifier pour les autres. Conscients que certaines personnes verront leurs cadeaux comme des indicateurs d'amour ("Comment m'aimes-tu ? Laisse-moi compter les cadeaux !"), ils se donnent beaucoup de mal pour choisir le cadeau parfait". Si vous êtes déjà obsédé·e par cette question à chaque période de fêtes de fin d'année, il se peut que ce soit tout simplement trop pour vous permettre de travailler à plein temps depuis la maison tout en vous occupant de vos enfants lors de cas de Covid à l'école ou de faire face aux autres changements anxiogènes que vous avez dû apporter à votre vie quotidienne en raison de la pandémie.
Pour moi, l'essentiel de la nervosité que je ressens à propos de la tradition des fêtes de fin d'année 2020 tient plus au fait de recevoir des cadeaux qu'à celui de les offrir. J'ai passé la majorité des huit derniers mois dans mon petit appartement, donc chaque centimètre carré est devenu plus précieux que jamais. Peu après l'instauration du confinement en mars, j'ai, comme beaucoup d'autres, fait une purge de toutes les merdes inutiles que j'avais dans mon appartement et j'ai fait de la place pour de nouvelles choses essentielles comme un petit espace de travail et quelques accessoires de sport. Je n'ai pas l'intention de m'en prendre à mes proches qui ont eu la gentillesse de m'offrir quelque chose au fil des ans, mais je dois être honnête et admettre qu'une grande partie des choses dont je me suis débarrassée étaient des cadeaux, dont des articles Secret Santa et White Elephant. Ce genre de petits cadeaux que vous n'achèteriez jamais pour vous-même peut vraiment commencer à s'accumuler. Alors maintenant, l'idée de devoir apporter chez moi des bibelots offerts par un collègue de travail ou un cousin bien intentionné, perturbant l'espace sacré que j'ai travaillé dur pour faire fonctionner mon nouveau mode de vie, eh bien, ça ne me réjouit pas.
La pandémie COVID-19 nous a obligés à repenser presque tous les aspects de notre vie quotidienne, de notre temps passé devant les écrans aux célébrations de mariage. Nous prenons le temps de reconsidérer toutes sortes de pratiques que nous considérions auparavant comme acquises. Pour le bien de notre santé mentale, cette révision devrait être étendue aux cadeaux de Noël, surtout si cela ajoute de l'anxiété à une année déjà difficile.