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Findom : je vends mes vêtements en ligne à des “money slaves”

Photographed by Poppy Thorpe.
C'est durant mes études que je suis devenue dominatrice. Je vends mes petites culottes à des hommes sur Reddit et mes chaussures à des soumis, mais pour moi, être une "findom" (dominatrice financière) est plus une activité secondaire qu'un style de vie. Un complément de revenu et un power trip ? Moi, ça me va. Actuellement, j'ai un "money slave" régulier (un homme qui a consenti à me servir financièrement). Il a tous les fantasmes classiques : lécher mes chaussures et des "plans DAB" - où l'on se retrouve à un distributeur pour qu'il me donne de l'argent. 
Il a aussi d'autres fétiches spécifiques aux vêtements. Par exemple, mon "money slave" a pour fantasme que je lui fasse une liste de vêtements qu'il doit acheter sur le site Depop, mais que je ne lui envoie jamais. Il rêve aussi que je lui envoie des culottes portées plusieurs jours pour les garder dans son caleçon ou sous son oreiller parce qu'il doit faire tout ce que je lui dis (dans des conditions convenues au préalable, bien sûr). 
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Pour les besoins de cet article, je lui ai demandé d'expliquer pourquoi il veut mes vêtements usagés. "Je vais être honnête, il y a beaucoup de choses que je n'arrive pas à comprendre, comme les chaussures et les chaussettes sales", m'a-t-il dit. "Mais j'adore le frisson que je ressens avec les dessous. C'est excitant d'avoir quelque chose d'intime qui t'a appartenu à toi : ma maîtresse".
Ce phénomène existe depuis aussi longtemps que l'Internet, et la dynamique des relations BDSM sous-jacentes depuis bien plus longtemps encore. Les raisons pour lesquelles une personne peut avoir envie qu'on lui vende des sous-vêtements sales et de participer à des actes de soumission sont multiples. Laura Vowels, une thérapeute de l'association de thérapie sexuelle et relationnelle Blueheart, me dit que "renoncer au pouvoir et être soumis peut donner à une personne un sentiment de libération". Elle poursuit : "Si, pendant la journée, une personne occupe un poste stressant à haute responsabilité, c'est peut-être la seule façon pour elle de lâcher prise. Une partie de ce sentiment peut également provenir de messages diffusés par les médias, dans lesquels les hommes, en particulier, sont présentés comme sexuellement dominants alors que les femmes sont présentées comme plus soumises".
Georgina, 21 ans, qui vend des culottes, des collants et des chaussettes à ses soumis, rejoint ce point de vue. "J'ai beaucoup travaillé avec des hommes plus âgés, riches, qui occupent des postes importants dans lesquels ils ne peuvent jamais baisser leur garde, mais en ma présence, ils lâchent complètement prise, ce qui les conduit à devenir complètement soumis. Elle explique que ses clients aiment acheter ses vêtements pour deux raisons. Soit la domination financière - où elle contrôle leur argent - soit ce qu'on appelle la "sissification", où le soumis aime être habillé en femme ou en poupée.
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Renoncer au pouvoir et être soumis peut donner à une personne un sentiment de libération.

Laura Vowels, thérapeute
Georgina estime que lorsque ces désirs de soumission émanent des hommes en particulier, ils découlent souvent de la masculinité toxique. Selon elle, la "virilité " que tant d'hommes estiment devoir entretenir se dissipe en privé. "Je pense qu'ils désirent être en phase avec leur côté féminin, mais se sentent trop gênés - ou ne savent potentiellement pas comment l'aborder - c'est pourquoi ils cherchent des dominatrices ou simplement des femmes plus fortes en général".
Nick Hatter, coach en comportement psychodynamique, pense également que l'échange entre soumis et dominants se résume à un échange de pouvoir ou, dans le cas du soumis, à la cession du pouvoir à quelqu'un d'autre. Dans le cas spécifique de l'achat de vêtements portés par un·e dom, il commente que "l'acte d'acheter des vêtements à un "dom" est un échange de pouvoir en soi. Il peut aussi lui sembler que le dom donne de l'amour, qu'il subvient à ses besoins - un peu comme un parent fournit des vêtements et de l'amour à son enfant. Le soumis veut probablement juste se sentir aimé".
Bien que cela soit lié au concept que souvent, le kink est lié à la gestion de nos traumatismes intérieurs, Vowels a précisé lors de notre entretien que "le BDSM peut aussi être incroyablement thérapeutique pour les personnes qui ont subi un traumatisme sexuel parce qu'il s'agit de lâcher prise, ou d'exercer un contrôle, dans un environnement sûr". Si nous nous concentrons trop sur les raisons pour lesquelles les gens s'engagent dans de tels arrangements, nous risquons de rendre l'expérience clinique alors qu'en réalité, c'est tout sauf cela. 
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Pour les personnes soumises, acheter des vêtements est une question de pouvoir et de libération, mais il est important de reconnaître qu'il s'agit également d'un acte sexuel. Comme le dit mon "money slave" : "Il y a un élément animal. C'est sale. C'est sexy. Il s'agit de vouloir ressentir une connexion brute avec votre dom". 
Alors que de plus en plus de personnes prennent conscience de la possibilité de vendre des vêtements déjà portés à des fétichistes qui prennent leur pied, les stigmates qui entourent le fait d'être dom ou soumis s'estompent peu à peu. Rebekka Blue, qui a non seulement fait carrière dans l'industrie du sexe, mais forme également d'autres personnes à devenir les meilleures findom possibles, est à l'origine de ce nouvel essor.

L'acte d'acheter des vêtements à un "dom" est un échange de pouvoir en soi. Il peut aussi lui sembler que le dom donne de l'amour, qu'il subvient à ses besoins - un peu comme un parent fournit des vêtements et de l'amour à son enfant. Le soumis veut probablement juste se sentir aimé.

Nick Hatter, coach en comportement psychodynamique
Sur son site web, Blue met en lien ses comptes OnlyFans, ses multiples boutiques et ses livres électroniques. Ces derniers contiennent des informations sur tous les sujets, de comment repérer les arnaqueurs à comment vendre des "objets insolites sur Internet ". Elle a accumulé plus d'un million d'abonnés à son TikTok, où elle propose une série des articles qu'elle vend à ses abonnés. (La liste comprend des chaises de bureau, des cotons démaquillants usagés et des bouteilles de sa sueur ainsi que bien d'autres bizarreries.)
Lors de nos échanges par e-mail, Blue m'explique qu'elle trouve généralement que "les soumis apprécient le sentiment de soumission qu'ils peuvent ressentir en achetant des objets personnels à des femmes. Cela peut aller d'un faible pour leur vendeuse [à] un sentiment d'adoration de leur déesse. Je vois souvent mes clients désireux de perdre tout contrôle et de se soumettre complètement au vendeur en lui offrant la propriété de leurs objets". 
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Alors que Blue a accumulé un énorme nombre de fans en ligne en parlant des choses les plus bizarres qu'elle vend à ses clients, elle me dit que "les culottes et les chaussettes sont les objets les plus populaires". Ils aiment aussi "les vêtements d'entraînement tels que les jambières et les soutiens-gorge de sport". Les demandes les plus courantes qu'elle reçoit sont "les soutiens-gorge vaporisés de parfum, ou la lingerie neuve avec des étiquettes". Elle affirme que "la majorité des acheteurs portent eux-mêmes les vêtements une fois qu'ils les ont reçus".
Cependant, pour Blue, ce n'est pas qu'une question d'argent. Elle est convaincue qu'il y a des avantages à être dominatrice et qu'il faut les mentionner. "J'apprécie le pouvoir que j'exerce sur mes soumis et quelle fille n'aime pas se sentir vénérée ?" dit-elle. "Il y a aussi le sentiment de bien-être que l'on ressent après avoir fait une vente et le retour sur investissement est assez impressionnant. Si vous achetez une culotte pour 5 euros et la vendez pour 50, vous éprouvez un sentiment de liberté par rapport à votre propre employeur". 
Georgina est d'accord pour dire qu'il y a un frisson dans l'humiliation que l'on ne trouve pas dans d'autres aspects de la vie. "On m'a reproché toute ma vie d'être ronde et de m'habiller bizarrement", dit-elle, "mais les mêmes hommes qui se moquaient de moi sont devenus ceux qui me demandent de les dominer et qui veulent m'acheter mes culottes sales - c'est une sensation de pouvoir incroyable".
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Le monde de la vente de vêtements portés (et de séparateurs d'orteils, de piercings de nombril, et même de stérilets dans le cas de Rebekka Blue) devient de plus en plus mainstream chaque jour. En effet, une de mes amies qui n'a jamais été une findom m'a récemment dit qu'elle avait été approchée sur Twitter pour vendre la veste en cuir qu'elle porte sur sa photo de profil avec un peu de son parfum dessus pour 340 euros et qu'elle l'avait sérieusement envisagée. La seule chose qui l'a arrêtée est "que c'est une veste Marques'Almeida pour Topshop, ce qui veut dire que c'est maintenant un objet de collection".
En ce qui me concerne (à l'exception des vêtements préférés), tant que les deux participants à un scénario de findom/sub jouent leurs rôles et réalisent leurs ventes dans le consentement mutuel et le respect de l'autre, je ne vois pas pourquoi ce phénomène ne devrait pas se généraliser. Comme Blue le dit clairement : "La société peut considérer ces échanges comme "bizarres", mais j'ai une grande admiration pour tous ceux qui ont la confiance nécessaire pour exprimer leurs désirs sexuels de manière sûre et consensuelle".
Enfin, Vowels soulève également un point important. Elle me dit que la dynamique sub/dom, comme d'autres fétiches, peut être ressentie comme une partie intégrante de l'expérience vécue par l'individu qui a cette préférence sexuelle particulière. "Il y a des gens pour qui le BDSM et les jeux de pouvoir sont comme une orientation sexuelle. Elles se sont senties attirées par la dynamique du pouvoir dès le moment où elles ont pris conscience de leur sexualité". Le kink est important dans la vie des gens et cela devrait être non seulement compris, mais aussi célébré. Il n'y a certainement aucune raison d'en avoir honte. Il n'y a absolument aucune raison de mépriser les fétichistes. À moins, bien sûr, qu'ils vous demandent de le faire - auquel cas, assurez-vous qu'ils vous payent d'abord.

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