En 2001, l'auteur érotique Dan Savage posait une question dans sa rubrique Savage Love : "À partir de ce jour, quel terme sera le mot communément accepté pour désigner une femme qui sodomise avec un gode ceinture ?" Ses lecteur·ices ont répondu : "le pegging".
Vingt ans plus tard, la popularité du pegging ne fait que croître. La marque de sex-toys Lovehoney a indiqué que les ventes de godes ceinture avaient augmenté de près de 200 % en 2020. Les représentations du pegging à la télé et dans la culture pop sont aussi devenues plus courantes : dans Peep Show, Jeremy se fait sodomiser par sa petite amie Michelle, alors qu'Abbi Abrams pratique le pegging sur Jeremy Santos dans un épisode emblématique de Broad City en 2015.
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Plus récemment, dans la comédie dramatique The Bold Type, Kat pratique le pegging avec un gars qu'elle fréquente, Cody. Au début, elle est sceptique. "Tu sais, je n'ai jamais aimé être dominante dans la chambre à coucher", confie-t-elle à Jane. "Et je ne suis pas très douée pour ça. Ce n'est pas mon truc." Mais Jane encourage Kat à essayer, ce qu'elle fait, et elle y prend plaisir. "J'imagine que je pensais que ce serait physique, sexuel et primitif, et ça l'était dans un sens, mais c'était aussi intime, tu vois ce que je veux dire ?".
Cela correspond à l'expérience de Joanna*, 22 ans. " En réalité, je suis plutôt soumise et je n'aime pas particulièrement me sentir dominante ", me dit-elle. "[Mais] je prends tellement de plaisir à voir à quel point il aime ça".
Elle a d'abord essayé le pegging avec son petit ami, qui a également une vingtaine d'années. Ce dernier avait abordé le sujet six mois après le début de leur relation. "Quand il m'en a parlé la première fois, il était hyper nerveux quant à ma réaction, mais j'étais très ouverte à l'idée", se souvient-elle. "C'était pendant le premier confinement de l'année dernière, donc nous ne nous sommes pas vus en vrai pendant des mois, mais nous en avons beaucoup parlé. Ça m'intriguait, alors quand on s'est revus, on a commencé à expérimenter".
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L'une des plus grandes idées reçues, c'est que pour le faire, il faut être une sacrée dominatrice, mais on peut tout à fait le faire avec beaucoup d'amour.
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"Au début, ça me stressait un peu parce que j'avais peur de lui faire mal, mais une fois qu'on s'habitue, c'est fun", poursuit Joanna. "Au début, j'ai fait quelques erreurs, comme être trop brutale ou aller trop vite, mais on apprend. Mon petit ami dit que je m'améliore à chaque fois que nous le faisons". Elle ajoute qu'étant donné que son partenaire est handicapé et que le nombre de positions qu'ils peuvent pratiquer est limité, le pegging a été un excellent moyen de maintenir leur vie sexuelle fraîche et excitante. "Découvrir une nouvelle façon de faire l'amour nous a fait un bien énorme".
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Megan*, 22 ans, s'est elle aussi essayée au pegging. Elle a un jour sodomisé un de ses amis proches, après une conversation où ils ont tous deux exprimé le désir d'essayer. "Nous parlions de l'intérêt de la dynamique du pouvoir et nous nous sommes dit que ce pourrait être plus qu'un sujet de conversation, que ça pourrait être quelque chose de vraiment intéressant à essayer", se souvient-elle. "Ça peut paraître comme un truc de niche, mais en fait, je crois que de plus en plus de gens en parlent et l'idée fait son chemin".
De son côté, Claire*, 25 ans, n'a encore jamais pratiqué le pegging, mais c'est un de ses fantasmes. "Je pense que le pegging me ferait me sentir puissante. C'est l'idée de mettre un gars à genoux, de le mettre dans cette position vulnérable", dit-elle. "Je me dis aussi qu'il aimerait ça et j'aime l'idée d'un homme qui serait prêt à explorer. C'est excitant de pouvoir être sur un pied d'égalité, mais aussi d'être tous deux vulnérables en même temps".
Il y a longtemps eu un tabou autour du pegging qui, en grande partie, est lié à une réticence à accepter la fluidité sexuelle. Bien que les stigmates s'estompent peu à peu, de nombreuses idées fausses circulent encore sur cette pratique. C'est ce qu'a constaté Claire lorsqu'elle a abordé le sujet du pegging avec des hommes hétérosexuels. Une question qui revient souvent, c'est : "C'est pas un peu gay ?", dit-elle. "Ça me fait toujours rire. Pourquoi votre masculinité est-elle si fragile et forcément associée à la domination des filles ?" Joanna convient que c'est une idée reçue. "Les gens [supposent] que la personne qui reçoit le pegging ne peut pas être hétéro - mais un bon nombre d'hommes cis hétéros que je connais aiment le pegging, y compris mon petit ami".
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Gillian Myhill, sexothérapeute et cofondatrice de l'application de rencontre BARE, espère que le fait de parler ouvertement du pegging nous aidera tous·tes à mieux accepter et comprendre la sexualité comme un vaste spectre. "Il y a définitivement un lien entre la montée en popularité du pegging et la progression des discussions ouvertes qui entourent actuellement le genre et la sexualité", dit-elle. "Pendant trop longtemps, ces sujets ont été tabous et c'est merveilleux de voir enfin une discussion continue et ouverte dans ces domaines".
Megan ajoute qu'une autre idée fausse courante est que les gens supposent que les femmes qui aiment le pegging doivent aussi être kinky. "L'une des plus grandes idées reçues, c'est que pour le faire, il faut être une sacrée dominatrice, mais on peut tout à fait le faire avec beaucoup d'amour", confie Megan. "Pas besoin d'en faire un truc vraiment kinky, ça peut juste être une source de plaisir pour les deux personnes".
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Une question qui revient souvent [auprès des hommes],c'est : "C’est pas un peu gay ?"
claire*
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Megan a raison : Myhill explique que la stimulation de la prostate - alias le point G masculin - peut être extrêmement agréable pour les hommes cis. "C'est une zone très sensible en raison du nombre de terminaisons nerveuses qu'elle contient", explique-t-elle. "Tous les hommes ne trouvent pas la stimulation de la prostate agréable, mais beaucoup. La stimulation de la prostate peut produire un type d'orgasme complètement différent".
Alors, quels conseils Joanna et Megan donneraient à quelqu'un qui voudrait essayer le pegging ? Toutes deux s'empressent de dire qu'il ne faut surtout pas lésiner sur le lubrifiant. Et Joanna d'ajouter : "Allez-y très lentement et progressivement - moins, c'est mieux au début". Megan souligne également l'importance de la communication. "Veillez à parler de vos émotions après coup", conseille-t-elle. "Parlez de ce que vous ressentez. Il y a de fortes chances que ce soit une expérience assez chargée en émotions pour vous deux".
En fin de compte, si vous et votre partenaire avez envie d'essayer le pegging, alors lancez-vous. "Il n'y a aucune raison d'en avoir honte, quelle que soit votre orientation sexuelle ou votre identité de genre ou celles de votre partenaire", affirme Joanna. "Si cela vous intéresse ou si vous voulez faire l'expérience, allez-y ! Et ce n'est pas grave si vous n'y prenez pas plaisir. Le tout, c'est de communiquer". Ce qui, à coup sûr, est un conseil judicieux pour toute personne ayant des rapports sexuels, quels qu'ils soient.
*Les noms ont été changés pour protéger l’identité des personnes interviewées.