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Oui, je suis une femme & je m’épile le visage. Quel est le problème ?

Photo par Anna Jay
Une situation qui nous est certainement tou·s·tes arrivée lors d'une épilation des sourcils est quand l'esthéticienne te demande "Moustache aussi ?" Beaucoup de femmes sont offensées. Mais pour beaucoup d'entre nous qui ont une pilosité faciale excessive, le rituel de l'épilation est aussi standard qu'un entretien bimensuel des sourcils. (En fait, nous sommes souvent content·es·s que l'esthéticienne ait demandé).
Le Dr Zainab Laftah, dermatologue consultante au HCA The Shard, affirme que la pilosité faciale excessive est également connue sous le nom d'hirsutisme et est répandue chez les femmes pour un certain nombre de raisons. "Cela peut être le signe d'une production accrue ou d'une sensibilité accrue de la peau aux androgènes, qui sont des hormones mâles", explique-t-elle. Le Dr Laftah identifie d'autres causes communes : le syndrome des ovaires polykystiques, certains médicaments et des problèmes hormonaux, tels que le syndrome de Cushing (où le corps est exposé à des niveaux élevés de l'hormone du stress, le cortisol, pendant une longue période). "L'hirsutisme n'est cependant pas toujours dû à une maladie sous-jacente", poursuit le Dr Laftah. Elle ajoute que l'excès de pilosité faciale tend à être plus fréquent chez les femmes de certaines origines ethniques, par exemple les femmes du Moyen-Orient, de l'Asie du Sud et de la Méditerranée.
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En tant que personne ayant des ovaires polykystiques et d'origine chypriote, je suis doublement plus poilue que la moyenne. Cela dit, la culture chypriote est familiarisée avec la pratique de l'épilation. J'ai eu ma première épilation complète du visage à 13 ans et trois esthéticiennes s'occupaient de moi dans un salon chypriote de l'est de Londres : l'une s'est occupée de ma lèvre supérieure et de mes pattes, tandis qu'une autre attendait patiemment d'atteindre mes sourcils.
Il y a une scène dans le film Mariage à la grecque dont je me souviendrai toujours. La famille se prépare pour le mariage de Toula lorsque son frère Angelo les attire hors de la salle de bain en leur promettant du baklava. Mais il n'y a pas de baklava. En fait, il veut seulement prendre des photos embarrassantes. Lorsque la cousine Nikki sort de la salle de bains, sa lèvre supérieure est bien sûr recouverte d'une épaisse couche de crème dépilatoire blanche. Dix-huit ans plus tard, je m'en souviens très bien. Pas seulement parce que la scène est assez drôle mais parce que, à 10 ans à peine, c'était comme se regarder dans un miroir. Lorsque la crème décolorante de Jolen ne parvenait pas à dissimuler mes poils foncés de moustache, ou simplement à leur donner une teinte jaune douteuse, l'étape suivante était évidemment de l'enlever entièrement avec une crème dépilatoire très agressive. Même si cela signifiait aller à l'école la plupart des jours avec des brûlures chimiques au-dessus de la lèvre supérieure…
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Même chez les femmes, l'épilation du visage n'est pas un sujet de discussion ouvert. C'est presque un secret honteux dont on ne parle très rarement, mais l'ouverture autour de ce sujet aidera à briser les stigmates qui l'entourent.

Dr Zainab Laftah
Aujourd'hui, me raser et m'épiler à la pince le visage fait partie de ma routine quotidienne, non pas parce que je juge nécessaire de me conformer à des idéaux de beauté limités, mais parce que cela me fait me sentir mieux dans ma peau. Bien sûr, vous n'avez pas besoin que je vous dise que se débarrasser de sa pilosité faciale (ou non) est un choix personnel. Faites-le ou ne le faites pas ; c'est à vous de décider. Mais il est difficile d'ignorer les réactions de choc et souvent de répulsion qui s'ensuivent lorsque les femmes déclarent qu'elles se débarrassent de leurs poils faciaux.
Des marques comme MAC, qui a refusé de photoshoper les poils du visage dans ses posts Instagram, ou encore comme les rasoirs Billie, qui a soutenu la pilosité faciale des femmes dans sa campagne publicitaire Movember sont nombreuses. Les femmes qui choisissent d'embrasser leur pilosité faciale bénéficient aujourd'hui d'un grand soutien. C'est considéré comme une forme d'autonomisation, une forme de reprise de contrôle. Alors pourquoi a-t-on l'impression qu'il y a deux poids, deux mesures pour les femmes qui décident qu'elles n'en veulent pas ?
Mes petits copains et mes ami·es proches ont tou·s·tes été dégoûté·es par ma routine quotidienne d'épilation, et un rapide passage sur Reddit révèle des histoires tout aussi gênantes. "Pendant des vacances entre filles, mon amie m'a surprise en train de m'épiler le menton dans la salle de bain", m'a raconté Abbie*. "Il s'en est suivi un long fou rire à propos de ma pilosité faciale et de la façon dont c'était 'bizarre' et 'dégoûtant' que j'aie des poils au visage, et encore plus que je me les épile". Abbie poursuit : "Je suis assez âgée maintenant pour ne pas me soucier beaucoup des commentaires acerbes, mais ne pas m'épiler le visage affecte vraiment mon estime de soi. Je ne dis pas que je ne quitterai pas la maison sans m'être épilée ou rasée ce jour-là, mais cela me fait vraiment sentir mieux. Je pense que c'est normal, pour être honnête".
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Pendant des vacances entre filles, mon amie m'a surprise en train de m'épiler le menton dans la salle de bain. Il s'en est suivi un long fou rire à propos de ma pilosité faciale et de la façon dont c'était 'bizarre' et 'dégoûtant' que j'aie des poils au visage, et encore plus que je me les épile.

Abbie*
Marianna a vécu quelque chose de similaire. "Une de mes meilleures amies se moquait de moi parce que j'avais utilisé Veet sur ma lèvre supérieure", m'a-t-elle raconté. "Elle me disait toujours qu'elle était contente d'être blonde avec la peau claire, pour ne pas avoir à s'occuper des poils noirs comme les miens. C'est quelque chose auquel je pense chaque fois que je prends un tube d'épilation !" Pour Andie, ce sont les membres de sa famille qui ont provoqué ce sentiment de honte : "Ma pilosité faciale est relativement duveteuse et fine, mais cela n'empêche pas ma mère d'essayer de me faire peur en pensant que l'épilation à la cire ou à la pince va soit ruiner complètement ma peau, soit faire repousser les poils plus épais et deux fois plus vite. Bien sûr, je sais que ce n'est pas vrai, mais cela me donne l'impression que ma décision de m'épiler est mauvaise, stupide ou pas très 'féminine'".
Le Dr Laftah convient que la pression sociale peut rendre les femmes gênées par leur pilosité faciale, surtout si elles choisissent de l'enlever. "Il existe une perception sociale selon laquelle les poils faciaux sont associés à la masculinité", dit-elle. "Même chez les femmes, l'épilation du visage n'est pas un sujet de discussion ouvert. C'est presque un secret honteux dont on ne parle très rarement, mais l'ouverture autour de ce sujet aidera à briser les stigmates qui l'entourent".
Le Dr Laftah signale qu'elle reçoit fréquemment dans sa clinique des patient·es présentant un excès de pilosité faciale, qui décrivent parmi les facteurs résultants une faible confiance en soi, un sentiment de malaise dans les situations sociales et une anxiété relationnelle. "Des études ont montré que l'hirsutisme peut être associé à une profonde détresse émotionnelle, à un niveau de qualité de vie inférieur et à la dépression", poursuit le Dr Laftah. "La pilosité faciale est normale, mais les femmes ne devraient pas être réprimandées pour avoir choisi de les enlever pour des raisons personnelles", ajoute-t-elle. "Les hommes ont le choix de faire pousser leurs poils faciaux ou de les raser. Les femmes devraient être autorisées à exercer le même droit".
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Il est intéressant de noter que la pratique de l'épilation a des racines historiques profondes. Les femmes de l'Égypte ancienne s'épilaient entièrement à l'aide de cires à base de sucre et de divers outils naturels. S'il est vrai que l'évolution de la mode et le regard masculin ont joué un grand rôle dans l'épilation au cours des dernières années, en 2020, de nombreuses femmes se sont réappropriées cette pratique.
En découvrant récemment une nouvelle marque de rasoir, dite "pour femmes d'abord", une amie a lancé une discussion sur la question de savoir si se raser, tant le corps que le visage, peut être considéré comme féministe. Bien sûr que oui. Se débarrasser de ses poils et défendre les droits des femmes ne sont pas incompatibles. Au contraire, promouvoir l'idée que les femmes peuvent choisir de garder ou de se débarrasser de leur pilosité faciale est une libération à sa manière.
Bien que de nombreuses femmes se sentent gênées ou pensent même qu'elles ont tort de s'épiler le visage, il semble qu'il y ait une exception à la règle : lorsque l'épilation est déguisée en une nouvelle tendance beauté. Selon Treatwell, les recherches sur l'application pour le dermaplaning ont connu une croissance énorme de 621 % d'année en année. Ce traitement très populaire, pratiqué par des facialistes, des esthéticiennes et des dermatologues qualifiés, consiste à utiliser une lame stérilisée ou un scalpel chirurgical pour enlever les cellules de peau morte. Ce faisant, toutes les traces de poils sur le visage sont également rasées. Les poils en question sont presque toujours qualifiés de "super fins" ou de "duvet de pêche". Mais pour celles et ceux qui ont des poils plus épais, plus foncés et plus abondants, se raser le visage n'est pas particulièrement tendance ou cool. Pour de nombreuses femmes comme Abbie et moi-même, c'est lié à notre bien-être personnel. Cela ne donne certainement pas à quiconque le droit de critiquer ou de se moquer.
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Si la pince à épiler, le rasage, l'épilation au fil, l'épilation à la cire et l'épilation à l'épilateur peuvent être rapides et faciles, ils se traduisent souvent par une repousse rapide et des poils sous peau, qui font paraître les poils plus épais ou donnent une sensation inconfortable de pilosité. Si vous recherchez des formes d'épilation plus permanentes, il existe d'autres possibilités à envisager. "Les techniques d'épilation physique comprennent l'électrolyse, l'épilation au laser et le traitement par lumière pulsée intense (IPL)", explique le Dr Laftah. "L'électrolyse est le seul traitement permanent des poils disponible. La technique consiste à faire passer un courant électrique dans le follicule pileux par une aiguille pour détruire le follicule et la racine du poil". Ce processus peut être long, coûteux et un peu inconfortable.
Les traitements au laser et à la lumière pulsée, bien que non-permanents, permettent de réduire la pilosité en ciblant le pigment du poil. "Par ce processus (connu sous le nom de destruction photothermique), on chauffe le follicule pileux et perturbe la croissance du poil", explique le Dr Laftah. "Le laser et l'IPL ciblent la couleur foncée des poils, donc fonctionnent mieux sur ceux qui ont un teint clair et des poils foncés, tandis que l'électrolyse convient à tous les types de peau et à toutes les couleurs de poils". Il existe des lasers, tels que le Nd:YAG, qui fonctionnent beaucoup mieux sur les tons de peau foncés. Le coût varie d'une clinique à l'autre et plusieurs séances sont nécessaires tant pour l'épilation au laser que pour l'IPL.
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Des options moins techniques et plus abordables comprennent des crèmes sur ordonnance qui peuvent être appliquées pour aider à réduire la croissance des poils du visage, explique le Dr Laftah, tandis que certaines pilules contraceptives comme Jasmine ou Dianette, qui ont une activité anti-androgène, ont montré qu'elles aidaient certaines femmes. "D'autres médicaments anti-androgènes, par exemple la spironolactone (un médicament contre l'hypertension, souvent prescrit par les experts pour contrer l'acné hormonale chez les femmes) peuvent également être utilisés pour réduire la croissance excessive des poils sous la supervision d'un dermatologue", ajoute le Dr Laftah.
Des pellicules aux règles, il est évident qu'il y a encore beaucoup de "tabous" à briser en ce qui concerne la santé, le bien-être et la beauté des femmes. Si le débat sur la pilosité du visage et son épilation est en voie d'amélioration, il n'en demeure pas moins que ces sujets sont toujours d'actualité.
*Le nom a été changé
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