PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

L’alcoolisme a détruit ma vie : 3 jeunes femmes racontent

Photographed by Flora Maclean.
Combien de fois vous êtes-vous réveillé·e avec un mal de tête en faisant cette promesse solennelle : plus jamais ça ! Pour beaucoup d’entre nous, le sentiment de gueule de bois, les bleus dont on ne sait trop comment ils sont arrivés là et les nausées qui vous font regretter votre existence, vont de pair avec une consommation d’alcool abusive. Mais certains des effets de l'alcool les plus graves sur la santé sont beaucoup moins bien connus ni même discutés, en particulier en ce qui concerne les femmes.
C'est peut-être parce que les statistiques sur la consommation d'alcool montrent que les hommes sont plus susceptibles de consommer de l'alcool que les femmes, et que les personnes âgées de 45 à 64 ans sont les plus susceptibles de boire. Dans le même temps, l'abstinence a augmenté chez les 16-44 ans depuis 2005, et les 16-24 ans sont le groupe le moins susceptible de consommer de l'alcool.
PublicitéPUBLICITÉ
Cependant, malgré ce qu’on entend dire à propos de la consommation d'alcool de la génération Y qui serait moins fréquente que celle de nos parents, lorsqu’on boit, on a tendance à le faire avec démesure.
« Tout le monde sait que les maladies du foie sont liées à l'alcool, mais ce qui est moins bien connu, c'est qu'elles touchent de plus en plus de jeunes et qu'elles commencent à toucher les femmes dans une mesure beaucoup plus importante que dans le passé, » explique la professeure Petra Meier, directrice du Sheffield Alcohol Research Group. « Les hôpitaux nous disent maintenant qu'ils voient de plus en plus de jeunes gens et de femmes dans la trentaine qui ont abusé de l'alcool un certain temps et qui ont vraiment endommagé leur foie.
Une étude publiée récemment indique que nos habitudes de consommation d'alcool à l'échelle nationale ont de graves répercussions sur le Service de santé. Une étude a révélé que 10 % des admissions aux urgences sont liées à l'alcool, et 10 % des Français consomment de l'alcool tous les jours.
« L'alcool peut affecter tous les systèmes de l'organisme, du cœur au foie en passant par le système nerveux, et sa consommation peut aussi avoir de lourdes conséquences sur la santé mentale, » explique le Dr Emmert Roberts, psychiatre spécialiste des dépendances.
« Lorsqu'une consommation d'alcool est telle qu'elle vous mène à l'hôpital, on peut dire qu'elle est excessive et cela affecte votre santé mentale et physique. Cela peut se traduire par une jambe cassée, ou une cirrhose du foie, » ajoute-t-il.
PublicitéPUBLICITÉ
Nous avons discuté avec trois femmes dans la vingtaine et trentaine dont la consommation sociale d'alcool s'est transformée en une dépendance à l'alcool plus grave, causant des dommages importants à leurs organes internes, leur système nerveux et même leurs os.

« Mon foie me faisait tellement mal que je n’arrivais plus à m’asseoir »

Sonia, une professionnelle des relations publiques de 37 ans, avait 24 ans lorsque sa spirale alcoolique s’est déclenchée suite à la rupture d'une relation à long terme. « J'avais tout planifié : me trouver un bon travail, m'installer, me marier, peut-être avoir des enfants. Quand nous nous sommes séparés, c'est tout mon monde qui s'est écroulé, » dit-elle.
« Au début, je me suis dit que j'allais sortir et essayer d'oublier tout ça, en espérant que je me sentirais mieux un jour. Malheureusement, cela a eu l'effet inverse : j'ai continué à boire et je ne me suis pas sentie mieux du tout, » ajoute-t-elle.
« Pendant cinq ou six ans, j'ai bu tous les jours, parfois dès sept heures du matin. Rétrospectivement, c'était beaucoup, et j'ai beaucoup de chance d'être en vie. J'étais jeune, je ne réfléchissais pas vraiment aux effets à long terme, et l'alcool a complètement pris le dessus sur ma vie. »
Originaire d'une communauté asiatique, elle ajoute que la honte et la stigmatisation autour de la toxicomanie n'ont fait qu'ajouter aux difficultés de Sonia. « Les anciens de la communauté asiatique ont tendance à porter des jugements, » dit-elle. « Peu de femmes asiatiques osent dire qu'elles ont des problèmes de dépendance. C'est quelque chose dont on ne s'attend pas à ce qu'elles souffrent. »
PublicitéPUBLICITÉ
Lorsqu'elle était au plus mal, Sonia raconte qu'elle ne mangeait plus et perdait du poids rapidement. Sa peau et le blanc de ses yeux sont devenus jaunes, et elle avait le teint pâle et l'air décharnée. Sonia souffrait également d'évanouissements constants, ainsi que de douleurs au foie et au bas du dos, au niveau des reins. « Il y a eu un moment où j'étais au travail, et c'était si douloureux que je n'arrivais pas à m'asseoir sur ma chaise pendant la majeure partie de la journée, » dit-elle.
« Mon médecin m'a fait passer quelques tests et on m'a dit que je devais arrêter de boire ou du moins réduire ma consommation drastiquement. C'était un avertissement : “Si vous continuez comme ça, vous allez probablement finir par avoir une cirrhose.” C'est là que j'ai su que je devais prendre ça plus au sérieux. »
Après plusieurs phases de sobriété et de rechute, Sonia est maintenant capable de boire avec modération. Elle dirige sa propre entreprise de relations publiques dans le domaine du sport. « J'ai l'impression d'avoir repris le contrôle de ma vie, » dit-elle. « Mais je m’estime heureuse. »

« À 21 ans, on m’a annoncé qu’il me restait deux mois à vivre si je n'arrêtais pas de boire. »

Bella*, 24 ans, a commencé à boire socialement à l'âge de 15 ans, mais c’est à 19 ans que les choses ont basculé, après la mort de sa mère. « Ma mère avait elle-même des problèmes avec l'alcool, et elle s'est suicidée. C'est vraiment là que tout a basculé. Lorsque j’étais au plus bas, je pouvais boire jusqu'à deux litres de vodka par jour, explique-t-elle.
PublicitéPUBLICITÉ
« Ma santé a vraiment commencé à se détériorer presque du jour au lendemain. Pendant quelques années, j'ai passé beaucoup de temps à l'hôpital, pour des programmes de désintoxication. C'est à 21 ans que ça a été le pire et que mes jambes ont cessé de fonctionner. C'était tellement douloureux que j'avais l'impression de marcher sur du verre. Cela m'a un peu secoué, parce que je ne comprenais pas ce qui se passait. On m'a dit que j'avais une neuropathie périphérique, où les terminaisons nerveuses meurent, » raconte Bella.
« Environ deux mois plus tard, j'étais de nouveau aux soins intensifs, cette fois avec de fortes douleurs à l'estomac et je vomissais du sang, » se souvient-elle. « À ce moment-là, on m'a dit que si je continuais à boire, il me restait deux mois à vivre, tout au plus. Ce qui est vraiment triste, c'est qu'à l'époque, ça ne me dérangeait pas vraiment. J'avais tellement mal et je ne voyais pas vraiment comment m’en sortir. »
Le premier anniversaire de son demi-frère a été une véritable prise de conscience. « J'étais à l'hôpital juste après une désintoxication et j'ai appelé ma famille sur FaceTime pour son anniversaire. C'est alors que j'ai réalisé que je n'étais pas la seule à avoir mal, que mon alcoolisme affectait aussi le reste de la famille. »
Après une désintoxication complète à l'hôpital, Bella a commencé à assister aux réunions des Alcooliques anonymes (AA) tous les jours et elle cela fait presque trois ans qu’elle est sobre. « Je n’ai jamais été aussi proche de ma famille, j'ai mon propre appartement et j'enseigne de nouveau, » dit-elle. « Je me suis enfin construit une vie. Une vie bien à moi. »
PublicitéPUBLICITÉ
Bella souffre toujours de lésions nerveuses à long terme, ce qui affecte son équilibre et elle souffre également de problèmes digestifs. Mais dans l'ensemble, dit-elle, sa santé s'est considérablement améliorée, et elle est « émerveillée par la façon dont le corps s’auto-guérit. »
« Quand j'étais à l'hôpital, on m'a dit que j'avais une maladie hépatique aiguë et on m'a montré des scintigraphies où mon foie était devenu plus gros et marqué. Chez une personne de 20 à 30 ans de plus, le foie ne se régénère généralement pas. Heureusement, en raison de mon âge, le mien a réussi à se rétrécir et a commencé à guérir, » dit-elle.

« J'ai eu une double prothèse de hanche à 30 ans. »

Geri, 32 ans, a commencé à boire du vin à l'âge de 15 ans. « Au milieu de la vingtaine, les choses se sont accélérées et à l'âge de 29 ans, je gardais toujours un verre de vin à côté de mon lit, car au réveil, mes jambes tremblaient déjà trop pour pouvoir m'extirper du lit, » explique Geri.
« J'ai été hospitalisée à plusieurs reprises, mais lorsque j'ai touché le fond, mes jambes et mon ventre se sont mis à gonfler, et j'avais de la difficulté à marcher à cause de la douleur, » se souvient-elle. « J'ai été transportée d'urgence à l'hôpital et mon père, qui avait été généraliste pendant 40 ans, m'a dit qu'il n'avait jamais vu un patient dont le taux de sodium était aussi bas que le mien. Malheureusement, parce qu'ils ont dû rétablir mon taux de sodium le plus rapidement possible, cela m'a causé des lésions cérébrales — ce qu'on appelle la myélinolyse du pont central, » ajoute-t-elle.
PublicitéPUBLICITÉ
« Je ne pouvais pas marcher, je ne pouvais pas parler correctement, ma coordination se détériorait complètement et il m'arrivait parfois de perdre le contrôle de ma vessie ou de mes intestins, » raconte Geri. « Je pensais avoir déjà touché le fond plusieurs fois, mais là, c'était environ 10 niveaux en dessous. C'est toute ma dignité qui a disparu.»
Geri n'a pas bu depuis cette hospitalisation, et elle était sobre à son 30e anniversaire, mais elle a eu une pancréatite chronique ainsi qu'une cirrhose du foie, qui a été diagnostiquée lorsqu'elle était sobre depuis six mois. « En gros, plus rien ne fonctionne correctement, » dit-elle.
Bien qu'elle soit sobre depuis près de trois ans, les séquelles de sa consommation d'alcool l'amènent régulièrement à se rendre à l'hôpital, tant pour des examens de routine que pour de nouvelles complications. « Peu de temps après qu'on m'a diagnostiqué une cirrhose, j'ai commencé à avoir mal aux hanches et j'ai reçu un diagnostic de nécrose avasculaire. En gros, mes hanches me lâchaient, alors j'ai dû subir une double arthroplastie de la hanche. Maintenant, tous mes os sont examinés régulièrement et je suis à la limite de l'ostéoporose, » raconte Geri.
*Le nom a été changé pour protéger l'identité de Bella.

More from Wellness

PUBLICITÉ