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L’essor problématique des chambres qui se transforment en activité secondaire

Photos via @totesforyouu et @holatravella
Le début d'une nouvelle année est synonyme de nombreuses choses : un afflux inévitable de discussions sur les régimes, des sapins de Noël nus alignés dans les rues de la ville et une course effrénée pour prédire les tendances de l'année à venir. WGSN, une autorité internationale en matière de tendances, fait partie de celles et ceux qui ont défini ce à quoi nous pouvons nous attendre en 2022. Parmi leurs prévisions en matière d'intérieur, aux côtés d'une augmentation des textures tuftées et du "scentscaping" (mariage parfumé), figurent les "side-hustle bedrooms" (les chambres d'activité secondaire), c'est-à-dire l'intégration délibérée de votre activité secondaire dans votre espace personnel.
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La popularité des activités secondaires n'a rien de nouveau, surtout ces dernières années. La pandémie a considérablement perturbé nos méthodes de travail et en particulier l'accès aux espaces autres que nos maisons. En tant que moyen de gagner un revenu supplémentaire, de monétiser un hobby ou de développer votre présence en ligne, les confinements ont représenté une occasion évidente de lancer quelque chose de nouveau. Inévitablement, le lieu de cette entreprise est votre intérieur, en particulier votre chambre à coucher. C'est l'espace le plus facilement disponible, surtout lorsque vous êtes en colocation et que vous ne voulez pas occuper l'espace de vie commun (ou peut-être que vous n'en avez tout simplement pas) avec l'équipement supplémentaire dont une petite entreprise a besoin. Votre chambre, par nécessité, devient votre bureau, votre entrepôt et votre studio en même temps.
La "side-hustle bedroom" est particulièrement visible sur TikTok, où de jeunes entrepreneu·r·se·s postent des vidéos de leur bureau/chambre/studio ou partagent leur transformation d'une pièce en une utilisation double de l'espace.
Réduire cela à une tendance montre comment le design d'intérieur répond à la double pression de notre culture du travail et de la crise du logement, et s'intègre dans le monde du "personal branding" (ou marque personnelle en français).
Gemma Riberti, responsable des intérieurs chez WGSN, explique à R29 que la chambre à coucher en tant qu'espace privé peut tenir les nombreux rôles que les jeunes millennials et la génération Z soutiennent, notamment "étudiant, stagiaire, créateur de contenu, fabricant et créateur d'une petite entreprise". Dans ce contexte, le fait de remplir plusieurs rôles est considéré comme un signe de flexibilité de la jeunesse et comme quelque chose d'ambitieux. "Avec un état d'esprit entrepreneurial", explique Gemma, "la chambre adopte différentes couches d'activité, du studio de tournage et du fond de vidéo TikTok à l'entrepôt d'expédition de colis, définissant ainsi la chambre d'activité secondaire".
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@holatravella From bedroom to MINI OFFICE!!! ❤️ Like for more 🤗 #HackItLikeAPro #fyp #interior #minioffice #workfromhome #fypシ ♬ Sunny Day - Ted Fresco
Ce que l'on oublie, c'est que le fait d'endosser tous ces rôles différents est souvent moins un signe d'esprit entrepreneurial qu'une réponse naturelle aux pressions du marché de l'emploi et du logement. Le travail s'infiltre déjà dans tous les aspects de notre vie, que nous le voulions ou non. La digitalisation des bureaux, la possibilité d'être en contact permanent et la nécessité pour beaucoup de télétravailler ont accéléré l'effondrement de la frontière entre le travail et la vie personnelle. De cet effondrement émerge une normalisation de l'insertion du travail dans les espaces privés et en dehors des heures de travail.
Lorsque le coût de la vie augmente, que les prix des loyers grimpent et que les salaires stagnent, il va de soi que les jeunes générations assument plusieurs rôles pour trouver de nouveaux moyens de gagner de l'argent. Ils n'ont pas eu l'occasion de séparer la vie et ce qui paie le loyer. Et ce loyer ne peut leur donner qu'une chambre dans laquelle ils peuvent opérer. Il s'agit à parts égales de la hustle culture, autrement dit la culture de l'agitation, et de la nécessité de s'en sortir.
@dafnarocks my room is very messy 🥰 go buy a tshirt !! link in bio !!! #smallbusinesscheck ♬ 8NIGHTS - Dafna & Cameron Desnoes
C'est ainsi que ces espaces domestiques absorbés par le travail deviennent des sites de marque personnelle à part entière. Comme le dit Gemma : "L'esthétique de la chambre à coucher devient un moment quotidien de branding potentiel". Le décor devient une partie de votre marque personnelle, qui est utilisée pour promouvoir votre activité parallèle, qui est maintenant intégrée dans votre chambre. Le fait que vous ayez une activité secondaire ajoute à son tour de la valeur à votre marque personnelle. Comme le dit Amelia Horgan, autrice de Lost In Work : Escaping Capitalism, à R29 : "Il ne s'agit pas seulement de l'espace limité disponible pour ceux qui essaient désespérément de s'en sortir, mais aussi de l'offre symbolique d'un contenu de vie 'réel' et 'authentique'".
La chambre d'activité secondaire est donc bel et bien générationnelle, mais il s'agit moins d'une nouvelle tendance passionnante que du reflet du fait que les jeunes générations n'ont d'autre choix que d'entreprendre. L'accès à l'espace, à l'emploi et à la capacité de séparer les deux est largement dépassé. Au lieu de cela, vous êtes mis·e dans une position où vous avez l'impression que vous devez marquer votre espace le plus privé comme faisant partie de votre activité afin de la faire avancer. Dans cette optique, le fait de nommer cela comme une tendance ne le rend pas convoité, mais montre comment nous vivons à une époque où nous ne permettons pas aux pièces d'être juste des pièces, où l'activité est centrée sur les espaces les plus privés de la maison et où suivre le format de l'influenceu·r·se qui consiste à fusionner la vie avec le travail et l'image de marque est un fait nécessaire de la vie.
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